Forêts en feu, propriétaires en colère…
Forêts en feu, propriétaires en colère…
2 August 2006
published by bourse.lefigaro.fr
Dans le sud, la prévention des incendies fait souvent plus de victimes que les feux eux-mêmes…
Paris, France — C’est le Groupement d’Intérêt Scientifique “Incendies de Forêt” qui le reconnaît : “les mesures destinées à maîtriser les risques d’incendie sont impopulaires par nature car elles remettent en cause les plans d’urbanisme, les projets d’implantation de zones industrielles et de développement des communes, et font peser des incertitudes sur lévaluation du foncier et de limmobilier auprès des citoyens. La dévaluation des biens immobiliers rend illusoire la délocalisation des populations, du fait de limpossibilité de trouver preneur sur le marché de limmobilier ou au mieux de revendre les biens acquis sans subir de pertes financières trop lourdes.”
Un village en colère
Démonstration la plus récente : les 1304 habitants du village de Tanneron, dans le Var, qui sont partis en guerre le mois dernier contre le Plan de prévention incendies de forêt à l’étude. Il prévoit en effet, dans sa forme actuelle, le classement de 97% de ses 5278 hectares en “zone rouge”, c’est-à-dire inconstructible. “C’est la mort de Tanneron”, s’est insurgé son maire, tandis que les 40 membres du Comité communal des feux de forêt ont démissionné dans la foulée.
Car la “zone rouge” prévoit l’interdiction de toute nouvelle construction, qu’elle soit destinée à l’habitation, à l’industrie, à l’artisanat ou au tourisme. Elle interdit par ailleurs la reconstruction des bâtiments sinistrés par les incendies et les locaux agricoles qui risquent d’aggraver les risques de feux ou leurs effets… Enfin, elle contraint la commune à de nombreux investissements, comme la mise en place de points d’eau à 150m maximum de chaque habitation ou la construction d’aires de retournement. De leur côté, les propriétaires sont soumis à un débroussaillage draconien tout autour de leur habitation. Avec parfois, comme dans le massif de l’Estérel, l’obligation “ubuesque” d’abattre des arbres pourtant situés en zone naturelle protégée…
Sortir de la “zone rouge”
La seule solution, pour ces communes situées en “zone rouge”, passe par des investissements coûteux dans des équipements ou activités anti-feu, aussi variés que des voies d’accès, des points et conduites d’eau, des activités agricoles, voire une piscine ou un golf… Les équipements à utiliser sont également très réglementés : ainsi, le PPRIF de Biot (06), prévoit que les piscines d’habitation doivent être équipées “dune motopompe de 15 m3/h de débit, actionnée par un moteur thermique, susceptible dalimenter une lance de 40/14 avec laide de trois tuyaux de 45 mm de diamètre et de 20 m de longueur” !
Une fois réalisés par les collectivités et les particuliers, ces travaux de protection à grande échelle permettent de négocier, au cas par cas, le passage de “zone rouge” à “zone bleue” (constructible sous condition) : ainsi, la ville de Théoule-sur-Mer (06), avait vu 90% de son territoire classé en “zone rouge” en 2001. Aujourd’hui, elle ne concerne plus que 5% de la commune… Ceci au prix de lourds investissements, subventionnés en partie par le conseil général et le syndicat des eaux. Car le noeud du problème réside bien dans le coût de ces travaux, qui s’imposent à tous les acteurs sous peine de forte amende (135 à 1500 en cas de non-débroussaillage)…
A chacun son risque…
Même en dehors des zones rouges, la prévention des risques a une contrainte : depuis le 1er juin dernier, les propriétaires d’un bien situé à l’intérieur du périmètre d’un plan de prévention des risques doivent, lors de toute transaction (vente ou location), informer l’acquéreur ou le locataire des risques d’incendie, mais aussi de tous les autres risques naturels (inondation, séisme, avalanche, etc…). Même chose concernant les sinistres survenus au bien depuis 1982.
Une obligation qui a le mérite de la transparence. Mais elle créé, elle même, un risque : celui de voir le contractant s’enfuir en courant…
