Lhafi : la forêt est notre avenir
Lhafi : la forêt est notre avenir
19 August 2005
publishedby www.aujourdhui.ma
De nombreux incendies ont ravagé cette année les forêts marocaines. Abdeladim Lhafi, Haut commissaire aux eaux et forêts et à la lutte contre la désertification, sexplique sur ce fléau qui guette de plus en plus les forêts du pourtour méditerranéen.
ALM : Au cours de cette année, de nombreux incendies ont été déclarés dans différentes régions du Royaume. Pourquoi nos forêts sont-elles aussi menacées ?
Abdeladim Lhafi : Le domaine forestier qui couvre environ 9 millions ha a les attributs dune forêt méditerranéenne soumise aux contraintes du climat, dune période de soudure longue (mai-novembre) et dune végétation sensible au feu. La situation des pays du pourtour méditerranéen montre, à lévidence, cette extrême fragilité ; la France et lEspagne connaissent un niveau de perte important malgré les moyens mobilisés. Le Portugal a perdu, à titre dexemple, durant les 5 dernières années, 20 % de ses forêts.
Cela étant, les pertes dans les forêts marocaines restent modestes ; lannée 2005, en létat actuel des données enregistrées, est bien en deçà de lannée 2004. En effet, les conditions météorologiques extrêmement défavorables, caractérisées par de fortes températures et des vents secs d’Est (Chergui), en plus de la présence d’une végétation abondante et sensible, favorisent le déclenchement et la propagation rapide des incendies. Noublions pas que le domaine forestier représente un espace ouvert, où l’accès (sauf rares exceptions) est libre. Il subit par conséquent une très forte pression humaine. Ainsi, la quasi-totalité des départs des feux résulte de laction de lHomme, par imprudence ou intentionnellement. Le nombre dincendies dorigine inconnue reste très élevé.
Quel est le dernier bilan des incendies qui ont ravagé les forêts au cours de cette année ?
Au cours de la période sétalant du 1er janvier au 16 août 2005, 431 incendies ont dévasté une superficie denviron 3167 ha. Il faut préciser quil sagit de superficies parcourues par le feu et non pas de pertes définitives. Le bilan sera affiné ultérieurement. En termes de répartition géographique des incendies de forêts, la région rifaine se place en tête (1915 ha), suivie du Nord-Ouest (702 ha), de lOriental (178 ha) et du Nord-Est (104 ha). Vous savez, la moyenne dhectares touchés par incendie est de 7,3 ha, ce qui dénote lefficacité du système dintervention. Par ailleurs, il est communément admis quune moyenne de 13 ha par incendie est un critère de performance.
Quelle est votre stratégie en matière de lutte contre les incendies ?
Notre démarche dans ce volet sinscrit dans les orientations du Plan directeur pour la prévention et la lutte contre les incendies de forêts. Notre stratégie dintervention repose sur un système gradué à quatre niveaux dintervention. Le premier niveau repose sur une gestion rapide et une prise en charge du départ du feu par nos services, avec des véhicules de première intervention. En deuxième lieu, lon a la mobilisation des services de la Protection civile, des Forces Auxiliaires et des Forces armées royales.
Le recours aux avions de la Gendarmerie royale et les avions C 130 constitue les deux derniers niveaux actionnés en fonction de limportance de lincendie. Dans ce contexte, le Haut Commissariat a mis en place un Programme daction national de prévention et de lutte contre les incendies de forêt au titre de lannée 2005, dont le budget alloué sélève à environ 163 millions DH, soit le triple du budget annuel habituellement attribué à ces actions.
Quelles sont les actions concrètes entreprises pour lutter contre les incendies de forêts ?
On a lhabitude dentamer, au début de chaque saison estivale, des actions pour lutter contre les incendies. Il sagit, entre autres, de la mise en place de guetteurs dincendies dans les zones à risque, de la réhabilitation de pistes forestières et de tranchés pare-feu, de lacquisition et de lentretien de matériel de radiocommunication, ainsi que de laménagement des points deau utilisables en cas dincendies.
Une protection maximale des espaces et patrimoines sensibles est assurée selon une approche de risque minimum : le risque zéro nexiste pas. Il s’agit, à travers ce principe, de se doter de postes de surveillance permettant d’alerter et de réagir le plus tôt possible. Pour cela, les zones fragiles et sensibles ont été équipées d’une logistique de première intervention. Notre efficacité reste tributaire de notre réactivité. Plus vite on intervient, mieux sont nos chances de réussite.
Vous menez actuellement une campagne de sensibilisation sur limportance de la protection des forêts
La communication professionnelle, choisie par le Haut commissariat, se base sur les possibles origines des incendies. Elle se fonde également sur la conviction que la gestion des incendies ne doit pas se faire dans un climat dadversité entre ceux qui protègent la forêt et ceux qui la détruisent. Nos spots, nos annonces et nos affiches sadressent à tous. Il y va de notre avenir et de celui des prochaines générations. Il reste, bien entendu, les comportements délictuels qui, eux, relèvent dun traitement prévu dans la législation en vigueur.